La Ministre de la Culture avoue la Censure

LIBERTE

Dimanche 3 février 2008 2

Entretien par ABDEL TAOS

La ministre de la culture dans un entretien vérité à “Liberté”

Khalida Toumi brise le silence

Réponses concernant le film de Jean-Pierre Lledo.

La culture peut-elle aller de pair avec la censure ? Les films de Jean-Pierre Lledo et celui de Nadir Mokhnèche n’ont pas pu être projetés à Alger…
Le visa d’exploitation, nommé visa de censure aux États-Unis, n’est pas une création algérienne. Il existe dans tous les pays, dans toutes les démocraties. Nous n’avons fait que reproduire les bonnes expériences.
Il faut distinguer trois cas :
Delice Paloma de Nadir Mokhnèche n’a pas été projeté parce que sa production en touchant l’aide de 2007, “Alger, capitale de la culture arabe”, s’est engagée à fournir une version 35 mn en langue nationale (arabe ou tamazight). Au lieu de cela, nous avons eu droit à un DVD en langue française. Sans commentaire.
Pour Jean-Pierre Lledo, nous avons le cas d’un documentaire de 52 minutes pour lequel la société de production a signé un contrat en bonne et due forme. Elle a déjà perçu un million et demi de dinars comme première tranche. Nous attendons toujours le 52 minutes qu’il s’est engagé à livrer. Si le contrat n’est pas respecté, et c’est valable pour toutes les sociétés de production, nous exigerons le remboursement de ce qui a été perçu. Cela ce passe ainsi partout où de l’argent public aide le cinéma.
Il y a dix jours, j’ai reçu une demande de visa d’exploitation pour le même film dans une version de plus de 2 heures et demie portant un titre différent. De qui se moque-t-on ? Nous visionnerons ce film de trois heures en présence de personnes interviewées et d’acteurs de la Révolution. M. Lledo recevra la réponse en toute clarté. Je n’ai pas vu le film, mais j’ai lu les débats dans la presse. Laissez-moi alors vous dire que tant que Khalida Toumi sera ministre de la Culture, jamais un film révisionniste faisant l’apologie de la colonisation et faisant passer nos résistants et nos libérateurs pour de vulgaires criminels, et la glorieuse ALN pour le GIA, n’aura de visa d’exploitation. J’aurai trop honte du regard de Djamila Bouhired et de Zohra Drif. Je vous l’ai dit, la honte est pour moi le pire des sentiments, pire que la peur.

C’est quand même de la censure alors ?
Appelez cela comme vous voulez. Chaque peuple défend le socle sur lequel il a construit sa nation. Vous pouvez aller dans n’importe quelle librairie ou bibliothèque, vous y trouverez des ouvrages parlant de la guerre de Libération nationale défendant des points de vue complètement différents.
Le débat est ouvert. Il est permis et même encouragé puisque les historiens et les chercheurs travaillent pour des centres et des laboratoires de recherche financés par l’État. Le président de la République a honoré la mémoire de Abane, de Messali, de Krim ou de Khider en baptisant de leur nom des édifices publics. Il n’y a pas de tabou. Mais, je ne permettrai jamais, chez nous, de révisionnisme ou d’apologie du colonialisme.

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